« _Galiléens pourquoi restez-vous là à regarder vers le Ciel ? _» Le
ciel, à ce moment précis semble être une échappatoire, un ailleurs. Les
disciples sont sans doute perdus. Le Christ s’en est allé et ils se
retrouvent seuls. Seuls avec cette mission qu’il leur a confiée. Seuls
avec les questions qu’ils doivent se poser sur ce qu’il convient
maintenant de faire. Seuls avec sans doute aussi les angoisses, les
peurs face à une telle mission. Seuls face à une population hostile qui
vient de mettre à mort Celui qu’ils avaient choisi de suivre. Seuls face
à un avenir encore à inventer, à construire. Seuls avec leurs limites,
leurs pauvretés, leurs fragilités. Et ils sont là, à regarder le ciel
comme s’ils se refusaient à poursuivre la route, comme s’ils se
sentaient incapables d’envisager l’avenir, comme s’ils étaient
paralysés.
Il y a sans doute des moments dans nos vies où nous nous trouvons aussi
comme paralysés, incapables d’envisager l’avenir. Le risque existe alors
de se fermer, parfois de se tourner vers le passé, parce que finalement
c’était mieux avant, surtout pour les disciples lorsque le Christ était
au milieu d’eux, parfois aussi de se fabriquer une religion refuge face
à un monde, une réalité trop dure, trop compliqué, trop douloureux dont
il faut se protéger et s’échapper. Ce n’est pas le message de l’Evangile
comme ce n’est pas le sens de cette fête de l’Ascension que nous
célébrons aujourd’hui. Car au moment où le Christ Jésus rejoint son
Père, il invite ses disciples non pas à s’enfermer, à se protéger, à
fuir le monde mais au contraire à rejoindre la Galilée, le carrefour des
nations, à rejoindre le monde, à s’y engager, à témoigner d’une Bonne
Nouvelle, à œuvrer dans ce monde pour que l’Evangile retentisse et le
transforme.
« _Galiléens pourquoi restez-vous là à regarder le Ciel_ ? » Mais parce
que saint Paul déjà nous y avait invité dans sa lettre aux Colossiens :
« _Si donc vous êtes ressuscités avec le Christ, recherchez les réalités
d’en haut : c’est là qu’est le Christ, assis à la droite de Dieu_ ». La
fête de l’Ascension c’est l’annonce d’une promesse faite par le Christ
aux disciples. Il leur dit qu’il ne les abandonne pas, qu’il ne se
détourne pas d’eux, qu’il continuera de veiller sur eux. Le Christ assis
près de son Père le prie sans cesse non pas pour que son Père les retire
du monde, notre religion n’est pas encore une fois une échappatoire, un
refuge, mais le Christ prie son Père pour qu’il garde les disciples du
mauvais comme nous le lisons dans sa prière sacerdotale au chapitre 17
de l’évangile selon saint Jean. Jésus dit aux disciples : « _Et moi je
suis avec vous tous les jours, jusqu’à la fin du monde._ » Quelle
promesse : tous les jours ! Pas les jours où tout va bien uniquement.
Pas les jours où tout semble clair. Tous les jours veut dire aussi ces
jours où rien ne va, ces jours où c’est les ténèbres, ces jours où les
disciples rencontreront aussi l’échec, les difficultés de la mission.
Et non seulement le Christ les assure de sa prière mais il leur promet
aussi de leur donner sa force de vie, de discernement, de sagesse, de
connaissance de la volonté de son Père par le don de son Esprit Saint. «
_Vous allez recevoir une force celle du Saint Esprit_ » dit-il aux
disciples. Cet esprit qui animait le Christ tout au long de sa vie
terrestre sur les routes de Palestine voilà qu’il le leur promet.
Frères et sœurs, en cette fête de l’Ascension, nous regardons le Ciel,
là où se trouvent les promesses de vie éternelle, là où nous puisons
notre espérance. Nous accueillons aussi pour nous-mêmes cette promesse
faite aux disciples, pas une promesse en l’air, pas une promesse de
campagne électorale, une promesse qui dure encore. C’est la promesse de
savoir qu’à tout moment de nos vies, nous ne sommes pas seuls, que le
Seigneur ne nous abandonnera jamais, quoi qu’il arrive, qu’il ne
détournera jamais son regard de nos vies. Assis à la droite de son Père,
le Christ par sa puissance demeure avec nous. Souvenons-nous de cette
promesse, à tout moment de nos vies et particulièrement dans ces moments
où son absence se fait ressentir plus fortement. Mais tout comme aux
disciples, voilà qu’il nous fait encore cette promesse qu’en chacun de
nous, par le baptême nous recevons son Esprit Saint. Cet Esprit qui
conduisait Jésus et le faisait agir pour le bien du monde, par le
baptême nous l’avons reçu. Un Esprit de sagesse, une énergie, une force,
une vigueur comme le décrit saint Paul dans sa lettre aux Ephésiens.
Les disciples ont cru en cette promesse qui leur avait été faite. Ils se
sont laissés conduire par l’Esprit du Seigneur. Ils y ont puisé les
forces nécessaires pour accomplir leur mission. Ils ont été même
capables d’audace pour que la Bonne Nouvelle puisse rejoindre tant
d’hommes et de femmes qui ne l’avaient pas encore entendue. Et parce
qu’ils ont cru, cela s’est fait. Parce qu’ils ont reçu cette promesse
avec foi, cela s’est réalisé. C’est cette même acte de foi que nous
sommes appelés à poser, c’est cette même confiance que nous devons
avoir. Ne détournons pas nos regards du Ciel, de cette espérance qui
nous donne confiance. Ne perdons pas de vue Celui qui nous assure de sa
présence, celui qui nous rappelle qu’il est avec nous tous les jours.
Dans le sacrement de l’Eucharistie, nous regardons le Ciel, le corps et
le sang de notre Seigneur Ressuscité. En Lui est la vie. En lui est
l’amour. En lui est l’espérance qui ne s’éteint pas. Amen
Père Mickaël, curé