Il n’aura pas fallu beaucoup de délibération aux hommes du Sanhédrin
pour se prononcer. Depuis longtemps, la cause était entendue. Il fallait
que Jésus meure ! Alors les choses vont très vite. Jésus est trimbalé
d’un lieu à l’autre pour être accusé, moqué, condamné et tué. Et on est
là à regarder cette succession de scènes. On y assiste comme témoin,
peut-être un peu complice, sans doute un peu craintif pour ne pas dire
lâche nous aussi, comme le sera l’apôtre Pierre. Tout s’enchaine dans un
flot de paroles, les accusations injustes, les cris ignobles de ceux qui
réclament la mort de Jésus, les mensonges proférés contre lui, le
déchainement de colère, d’agressivité d’une meute de loups prêt à mordre
jusqu’au sang.

Et il faut la mort de Jésus en croix pour que tout s’arrête, pour que
les bruits, les cris, les mensonges fassent place au silence. C’est
fini. La mort de Jésus vient faire taire la méchanceté et la lâcheté des
hommes. La mort de Jésus vient mettre un terme à ce déchainement de
violence et de haine. « _Tout est accompli _». Le silence de mort dans
lequel le Christ Jésus est plongé est déjà le lieu même d’une victoire
annoncée. C’est le silence précédant la sonnerie des trompettes dans le
livre de l’apocalypse, un silence d’environ une demi-heure précise
l’auteur de ce livre. C’est le silence précédant l’œuvre de la création
de Dieu dans le livre de la Genèse. Il y a des silences qui annoncent la
vie. Il y a des silences chargés d’espérance. Il y a des silences qui
sont des preuves d’amour. Tel est le silence du Christ sur la croix. Il
n’est pas un silence de tristesse. Il est un silence de confiance en
Dieu son Père qui conduit ceux qui lui obéissent jusqu’à la victoire
définitive, jusqu’à la vie éternelle.

Le Christ ce soir nous invite à ce silence, à nous tenir en silence au
côté de ceux qui souffrent, à garder le silence devant l’absurdité des
hommes, à demeurer dans le silence quand il n’y a rien à dire, à goûter
le silence qui est un lieu de paix. Le monde a tant besoin de silence.
Nos vies ont tant besoin de silence car c’est là avec le Christ que se
reçoit une espérance plus forte que tout, plus forte que la mort. C’est
là que s’apprend avec le Christ la patiente confiance qui nous permet de
supporter l’épreuve. C’est là que s’invente avec le Christ une
solidarité avec nos frères et sœurs en humanité.

Dans le silence nous regardons Celui qu’ils ont transpercé pour recevoir
l’Esprit de vie qu’il nous donne déjà ce soir et nous tenir alors aux
pieds des croix des hommes. Amen

Père Mickaël Le Nezet, curé