En écoutant cet évangile de la visite des mages à l’enfant Jésus, j’ai toujours été interpellé de voir que lorsque le roi Hérode interroge les scribes et les grands prêtres au sujet de la venue du Messie, ceux-ci sans hésiter citent le texte prophétique annonçant la naissance du Messie à Bethléem. Ceux-ci connaissaient les écritures, le lieu de la naissance du Messie et la mission de Celui-ci mais cela n’a rien changé pour eux. Ils ne sont pas mis ne serait-ce qu’en quête du Messie tant attendu depuis des siècles. Ils n’ont pas bougé ! Comme quoi, on peut savoir des choses sur le Christ, on peut connaître son origine et sa mission, sans que cela ne transforme la vie des gens. 2000 ans plus tard, les choses n’ont pas beaucoup changées reconnaissons-le. Je peux connaître l’identité du Christ et même les lieux où je peux le rencontrer sans que cela ait beaucoup d’incidence sur ma manière de vivre.
Les mages eux ne savaient rien sur le Christ. Ils étaient bien loin de la culture religieuse des scribes et pharisiens, bien loin même de l’histoire du peuple élu et du Messie attendu. Mais eux, ils se sont mis en route. Quelque chose les a poussés à prendre la route, à se risquer dans une aventure audacieuse en quittant des sécurités pour se mettre en quête, à la recherche d’une joie qu’ils présentaient sans trop savoir ce qu’elle était. Ils ont suivi l’étoile. Je me suis demandé qui sont les mages aujourd’hui.
Les mages se sont tout d’abord les catéchumènes. Ceux qui se mettent en marche vers le baptême. Nous avons eu la joie l’année dernière de baptiser deux adultes de notre communauté. Cette année, plusieurs adultes se sont mis en route vers le baptême, la communion ou la confirmation. Ils viennent parfois de très loin après un parcours semé d’embuches, de remise en question, de changement de direction. Les étoiles qui les ont mis en route sont différentes. Pour certains ce sera une épreuve de santé, pour d’autres un décès, un accident, pour d’autres le parcours catéchétique de leurs propres enfants. La présence des catéchumènes dans notre Eglise est une chance, une grâce, un émerveillement. Ils nous réveillent et nous bousculent. Ils nous obligent à nous reposer les raisons de notre présence dans l’Eglise, ce à quoi nous croyons, qui est vraiment le Christ pour nous. Ils ne veulent pas de simple discours de notre part. Ils veulent un témoignage crédible de notre part.
Les mages se sont aussi les recommençants, ceux qui après s’être éloignés de l’Eglise, se sont mis en marche à nouveau vers elle. Et il y en a beaucoup, même dans notre paroisse. Pour certains la perte d’un être cher semblait trop injuste pour continuer à croire en la bonté de Dieu. Pour d’autres, pris dans le tourbillon de la vie, la pratique religieuse perdait peu à peu de l’importance. Pour d’autres enfin, un mauvais accueil de la part de l’Eglise, l’attitude de tel prêtre, le comportement de tel chrétien remettaient en cause le sens de leur appartenance à cette Eglise. Et cela les a éloignés. Et puis, une rencontre, une parole, un événement ont rallumé une étoile dans le cœur de ces personnes. Et alors se réveille en eux le désir de redécouvrir le message du Christ et de sentir sa bonté, sa miséricorde, de se retrouver avec des frères et des sœurs, en communauté pour partager et s’enrichir de la présence des autres. Et là aussi ces personnes viennent nous bousculer, nous interroger comme ce couple qui n’avait pas communié depuis tant d’années et qui s’étonnait de voir tout le monde se précipiter pour communier alors qu’à leur époque cela ne se faisait pas systématiquement. Ces recommençants nous invitent à une certaine cohérence entre notre vie de foi et notre vie au quotidien, à une justesse dans nos pratiques. Ils sont une grâce pour notre Eglise.
Les mages se sont enfin pour moi les jeunes dans notre Eglise. Dans notre paroisse ces jeunes témoignent d’une joie de vivre leur foi et d’en témoigner. Je ne dirai jamais assez ma fierté de les voir présents lors de nos rassemblements. Ils viennent de loin. Ils n’ont pas connu les débats postconciliaires. Ils ne s’arrêtent pas aux détails qui parfois prennent trop d’importance dans nos pratiques. Ils sont loin de nos peurs d’afficher notre appartenance à l’Eglise, loin de nos questions de gestion interne de notre « boutique ». Ils ont toujours été dans un monde où être chrétien et encore plus catholique n’est plus une évidence, où cela veut dire vraiment quelque chose. Mais ils sont heureux de croire et ils le disent, heureux de témoigner et ils s’engagent. Oui, comme les mages ils nous apportent des étoiles d’espérance, de force et de joie.
Mes amis, ces mages de notre temps nous invitent à la joie et nous manifestent une réalité si importante: le Christ mérite d’être adoré et d’être aimé. En Lui est la vie. En offrant l’or, les mages nous disent que cet enfant est le Roi de l’univers. Choisir de se laisser guider par Lui, de prendre au sérieux son enseignement dirigera nos vies sur un chemin de bonheur. En offrant la myrrhe, ils nous disent que cet enfant est le Fils de Dieu. Il nous enseigne que Dieu est un Père plein de miséricorde pour chacun de nous. En offrant l’encens, ils nous disent que cet enfant donnera sa vie par passion pour nous, et que ce chemin de la passion, du don de soi est le chemin qui nous ouvre à la vie. Alors mes amis, en ce début d’année, encore une fois, choisissons le Christ. Approchons-nous de Lui, dans les sacrements, dans la méditation de sa Parole, dans le service des plus petits. Prenons-le dans nos bras, dans notre cœur, dans notre vie. Réveillons-nous. Nous ne perdrons rien, nous gagnerons tout car qui croit en Lui a la vie éternelle. Qui croit en Lui et le choisit trouvera l’appui nécessaire pour avancer et la joie vraie qui rien ni personne ne peut nous enlever. Amen.
Père Mickaël Le Nezet, curé.